J’ai commencé une première fois ce roman.
(Attention, je vais raconter ma vie) Ma fille était encore petite (6 mois). J’ai lu quelques pages, jusqu’à ce qu’on arrive au récit de la mort de la soeur de l’héroïne. Je n’étais pas prête à lire ça. Moi qui suis une angoissée de service, ça m’a fichu la trouille. Et je me suis dit que j’allais attendre un peu.
Voilà, quelques mois plus tard, je me sens plus sereine et j’ai enfin pu me plonger dans ce roman extraordinaire !
Pétula vit avec son père, sa mère et des chats, beaucoup beaucoup de chats.
Pétula est une pessimiste de premier ordre. Elle préfère prévenir que guérir. Elle imagine toujours le pire. Avant, elle n’était pas comme ça. Son comportement a changé à la mort de sa petite soeur de 3 ans, Maxine, dont elle se sent responsable. La petite fille est morte en s’étouffant avec un bouton que Pétula avait cousu sur un déguisement de loup fabriqué par ses soins. Accident malheureux et imprévisible mais terrible.
Pétula se sent coupable. Cela la mine. Au lycée, elle s’est isolée, même de sa meilleure amie Rachel avec qui elle était pourtant très complice.
Seul contact avec d’autres adolescents de son âge : le groupe ART-PSY auquel elle se joint toutes les semaines, contrainte et sans grande conviction.
Dans ce groupe, il y a Koula, une jeune fille excentrique, alcoolique mais surtout malheureuse, Alonzo un jeune homme mis à la porte par son père après l’annonce de son homosexualité et Ivan, un garçon taciturne et étrange qui a perdu sa mère.
Et puis, Jacob débarque. Pétula l’appelle “l’homme bionique” car il a une prothèse à la place de la main droite. Passionné de cinéma, Jacob plaisante beaucoup mais reste assez mystérieux concernant son passé.
Il va bouleverser la vie de Pétula mais aussi celle des autres. Tous vont devoir affronter leurs problèmes. Jacob y compris.
C’est un coup de coeur.
Bon, en même temps, j’aurais dû m’en douter. Je suis fan de Susin Nielsen et elle ne me déçoit jamais.
J’ai déjà posté un article sur On est tous faits de molécules et je vais peut-être me répéter un peu sur certains aspects de sa façon d’écrire. Tant pis. Mieux vaut deux fois qu’une.
Quel talent !
Quelle belle histoire ! Quels personnages fantastiques ! Quelle émotion !
On a encore une fois un roman qui conjugue rires et larmes à la perfection. Car oui, j’ai ri mais j’ai aussi pleuré.
Ce roman est très touchant. Mais pas seulement à cause de l’histoire de Pétula (qui est terriblement triste). Il y a autour d’elle des adolescents en souffrance dont on suit aussi l’évolution à travers les séances de groupe. Les parcours de vie de Koula, Alonzo, Ivan et Jacob sont aussi extrêmement durs et émouvants.
Mais encore une fois, dans cet enchevêtrement de malheurs, la lumière est là :
- dans des répliques de Pétula, Jacob, Koula, Alonzo et les autres qui ont un excellent sens de la repartie
- avec des personnages qui ne lâchent rien (le proviseur, Betty…)
- avec les chats, leurs noms loufoques (Heidi, Stuart Little, Maman Moumine, Gruffalo, Elmer/Fred, Eloïse/Ginger, Fifi Brindacier/Lorena Bobbitt) et leurs performances d'acteurs
- dans des petits moments où la vie redevient presque normale
- dans des scènes drôlissimes…
Susin Nielsen sait mettre une pointe d'humour quand il faut. A des moments où on ne s’y attend pas, à des moments où on est au bord des larmes. C’est fort.
Et puis surtout, Susin Nielsen a un réel talent pour rendre ses personnages terriblement attachants, qu’ils soient principaux, secondaires ou animaux.
Pétula est une héroïne qui porte tellement sur ses épaules. Elle a cette culpabilité par rapport à sa soeur. Elle est persuadée que ses parents la tiennent pour responsable. Pétula essaie aussi de maintenir le couple parental que l’on sent à la dérive, brisé par le drame que la famille a vécu. Chacun compense comme il peut : Pétula en collectionnant des articles de journaux d’accidents quotidiens un peu “bêtes” (Ca la rassure et la fait se sentir moins seule), son père en se plongeant dans le boulot et sa mère en recueillant des chats perdus.
Pétula se débat avec ses angoisses à la maison mais aussi au lycée où elle n’a plus vraiment d’amis. En elle, ça bouillonne.
On a envie qu’elle s’en sorte.
Et les autres aussi. Koula, Alonzo, Ivan et Jacob ont vécu des drames alors qu’ils ne sont que des adolescents et qu'ils ont la vie devant eux.
Il y a également les parents de Pétula, Rachel, son ex-meilleure amie, Betty qui anime le groupe ART-PSY et qui rame un peu, le proviseur, un vrai gentil...
Tous mais vraiment tous les personnages sont touchants. Je me répète mais c’est tellement vrai.
Le contrat (s’il y en avait un au départ) est rempli.
Ce roman est un des meilleurs de l’autrice même si je serais bien en peine de les départager car tous m’ont laissée un souvenir fort.
Celui-ci m’a peut-être particulièrement parlé car j'ai tendance à voir le verre à moitié vide plutôt qu’à moitié plein…
J’ai refermé ce livre avec la boule au ventre. Pas parce que j’étais triste mais parce que Susin Nielsen avait encore réussi à m’emmener là où je ne m’attendais pas en compagnie de héros que je n’avais vraiment pas envie de quitter.
Enfin, juste, prenez ce livre, lisez en quelques pages et vous verrez, je ne vous ai pas menti. C’est magnifique.
Merci Mme Susin Nielsen.
Pour ceux qui aiment les chats.
Pour ceux qui veulent un roman qui remue et qui aiment les histoires fortes.
Pour ceux qui ont envie de rire mais qui n'ont pas peur de pleurer.
A partir de 15 ans.
Le nouveau psy de Pétula à la fin du roman s’appelle Cosmo Economopoulos et il aime le scrabble. J'ai souri en repensant à cet autre très beau roman de Susin Nielsen.
(cf Moi, Ambrose roi du scrabble)
Ce roman fait partie de la sélection du prix des Incorruptibles 2018/2019 pour les 3e/Lycée.
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