Gingo

Soumis par HashtagCeline le ven 02/02/2018 - 15:08
"La question de savoir si la machine est humaine ou pas est évidemment toute tranchée- elle ne l'est pas. Seulement, il s'agit de savoir si l'humain, au sens où vous l'entendez, est si humain que ça" Jacques Lacan, 1955
#BonneAnnée

Ce roman a été ma première lecture de l’année 2018.
Et je suis contente d’avoir porté mon choix sur Gingo de Sarah Cohen-Scali. C’est un coup de cœur et à dire vrai, j’ai bien failli passer à côté.
 

#AllerAuBout

J’ai bien failli ne pas aller au bout de ce roman… Ah ! Quand j’y repense, j’en ai mal au cœur. J’ai commencé Gingo avec en tête ma superbe lecture Max (il faut que je fasse un post dessus). Ce roman historique de Sarah Cohen-Scali m’avait bouleversée et m’avait aussi mise bien mal à l’aise mais j’avais adoré. 

Là, première lecture de l’année : après les fêtes, pas trop de temps, reprise du travail. Je n’étais pas vraiment dedans. Enfin si au début. Et puis j’ai eu un petit passage à vide. 
Et du coup, comme je traînais dans ma lecture, j’avais décidé de la stopper, bêtement, à 100 pages de la fin… Mais, j’étais déjà allée trop loin… Je savais que je devais continuer. L’écriture de Sarah Cohen-Scali combinée à cette histoire intrigante m’ont fait revenir sur ma décision. Je me suis dit : « Tu ne vas tout de même pas t’arrêter maintenant ?» 
Alors, j’ai repris ma lecture et je l’ai finie d’une traite. Une fois la dernière phrase lue, j’ai refermé le livre, soufflée, complètement scotchée par le dénouement.
 

#Intarissable

Attention, cet article va peut-être être long et il aurait pu l’être encore plus tant ce roman m’a plu et tant j’ai envie d’en parler. Mais je vais essayer de me retenir car je ne voudrais pas gâcher cette lecture à quelqu’un en dévoilant des éléments importants.
 

#DeQuoiCaParle?

Suite à un conflit mettant en cause l’utilisation intensive du numérique et d’internet (à des fins préventives contre la criminalité, entre autres), la population s’est trouvée divisée : ceux qui voulaient une déconnexion totale contre ceux qui la refusaient, prônant une toute puissance du numérique. 
Cette dernière catégorie, une minorité (les blancs) prit alors le dessus sur l’autre (les bleus), poussant l’usage des réseaux, d’internet et des nouvelles technologies à l’extrême. 

L’action du roman se passe dans une cité indéterminée où blancs et bleus sont séparés les uns des autres par un mur. Les blancs ont des postes importants, des beaux appartements tout confort, de beaux enfants bien comme il faut : une vie privilégiée. Ils exploitent et contrôlent la vie des bleus. En revanche, les blancs dépendent tout de même de quelque chose : leur APR*, Assistant Personnel Robotisé, implanté en sous-cutané.

 *« Il était chargé H24 d’une somme considérable de tâches autrefois opérées par les applications d’un smartphone. Il gérait, entre autres, les mails et SMS de son utilisateur, sa navigation sur le Net, ses différents comptes sur les réseaux sociaux, ses comptes bancaires, son dossier médical, professionnel, sans oublier– et en faire la liste exhaustive serait impossible – tout ce qui avait trait à l’amélioration de son quotidien. »

De l’autre côté, les bleus sont cantonnés à des travails beaucoup moins gratifiants, bien souvent au service des blancs. Côté famille, ils peuvent faire une demande pour avoir un enfant naturellement. Uniquement sur dossier, la sélection est drastique. Leur deuxième option : adopter. Sauf que l’adoption que l’on propose aux bleus est également soumise à conditions. En effet, les adoptants se verront confier un bébé au physique disgracieux, aux capacités mentales restreintes et pendant une durée limitée : une dizaine d’années, après quoi on leur retire la garde. Pour les bleus, cette option reste une chance dans un monde qui leur refuse tout.

Jade est mariée avec Alban. Tous deux souhaitent concevoir un enfant. Sauf qu’ils attendent toujours un accord des Autorités blanches. Leur dossier est examiné. Auront-ils le droit ? Ou devront-ils adopter ?
En attendant le verdict, la jeune femme trouve un emploi comme gouvernante chez Viv. 
Cette dernière est une blanche qui, elle, a eu la chance d’avoir deux beaux et intelligents bambins. Il faut dire qu’avec son mari, elle a pu choisir les caractéristiques physiques, les capacités, et même le métier qu’ils exerceront… Tout cela lors de la procréation virtuelle. Car oui, tout se fait virtuellement. Pas question de faire l’amour et surtout de porter un enfant !

Jade se dit que si elle fait bonne impression, Viv pourra appuyer sa demande pour le bébé. Arrivée à la Cité blanche, Jade est très vite déstabilisée et surtout horrifiée par l’hyperconnexion des blancs, par l’éducation réglée à la minute près des enfants, entre autres choses. Cette façon de vivre va à l’encontre de bon nombre de ses principes. Alors elle décide de prendre quelques libertés.
Mauvaise idée. Les sanctions tombent: elle est renvoyée et sa demande de naissance naturelle est refusée.
Jade décide donc d’adopter. Et c’est là que Gingo entre en scène.

#NePasEnDireTrop

Je préfère stopper mon résumé ici. Même si bon, je me suis déjà pas mal étendue sur l'intrigue...
Mieux vaut que je vous laisse maintenant seuls pour faire connaissance avec Gingo (cet enfant pas comme les autres mais terriblement attachant) et découvrir son histoire. 

#CoupDeCoeur

Voilà. C’est un coup de cœur. Pourquoi ?
Parce qu’il est vraiment mais alors vraiment bien mené ce roman. L’auteure nous balade, enfin moi, elle m’a baladée jusqu’au bout. 

La construction du récit est très intéressante mais aussi un peu déstabilisante.On a presque l’impression qu’il y a plusieurs récits dans le récit. Même s’il n’y a pas de découpage en plusieurs parties, on a des coupures nettes dans l’action et des changements dans la narration. On a parfois l’impression que le style varie en fonction du personnage que l’on suit : exalté et spontané avec Jade, froid et calculateur avec Viv et décousu avec Gingo.

Et surtout, ce roman interroge sur notre société actuelle. Ici, tout est poussé à l’extrême mais d’un autre côté, pas assez pour que ce qui s’y passe soit inenvisageable ou incroyable.
Le contrôle des naissances, cette envie de perfection, cette intrusion du net et du numérique dans le quotidien, cette fracture sociale, cette répression outrancière de pseudo-délinquance, ces inégalités trouvent une résonnance dans notre monde actuel. Et c’est ça qui est dérangeant. On se projette bien, malgré tout.
Si l’on regarde la bibliographie de Sarah Cohen-Scali, on comprend tout de suite qu’elle aime mettre le doigt sur ce qui fait mal et nous obliger à poser le regard sur des choses que l’on préférerait ne pas voir.

A côté de tout ça, c’est aussi un beau portrait de mère qui se bat pour son fils qu’elle aime envers et contre tout. Jade n'est pas sûre d'accepter Gingo et encore moins de l'aimer, quand on lui confie. Et pourtant, l'amour va lui faire déplacer des montagnes.

Ce roman est vraiment très très riche en terme des réflexions qu’il peut amorcer. Il pose des questions, les bonnes.

Je vais m’arrêter là et j’oublie sans doute de parler de certains aspects du livre...

En tout cas, je n’oublierai pas ce livre qui m’a vraiment remuée et surtout pas Gingo, son héros si particulier.

#MentionSpéciale

Bravo aux éditions Gulf Stream pour le choix de la couverture. En règle générale, dans la collection Electrogène, elles sont vraiment travaillées. C'est encore une fois le cas.

Magnifique !

Coup de cœur !
Collection
Editeur
Public
Date de sortie
Nombre de pages
360
Langue
Français
Image

#VosCommentaires

#OnContinue ?

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