J'ai découvert Philippe Arnaud avec son roman La Proie (cf. mon article pour la revue Page des libraires). J'avais trouvé ce texte particulièrement saisissant et dénonçant un terrible fait d'actualité assez inédit en littérature ado. Cette histoire m'avait passionnée.
J'étais donc curieuse de lire l'auteur sur un autre sujet, s'adressant à une autre tranche d'âge avec un Pépix qui m'avait l'air intriguant.
L'auteur reste fidèle à lui-même et ne peut s'empêcher de dénoncer des injustices et parler de sujets brûlants. Ici le harcèlement scolaire.
" Dans mon collège, les adultes disent que je suis un cocktail explosif d'insolence et de rébellion. Alors, quand un vieux millionnaire m'a recruté comme agent secret, j'ai adoré l'idée : aller dans les salles de classe du monde entier pour défendre les faibles contre les tortionnaires qui les harcèlent. Alexandre, agent secret ! "
Parler du harcèlement scolaire est devenu assez courant en littérature jeunesse ces derniers temps. C'est une bonne chose même si tous les romans qui l'abordent le font avec plus ou moins de pertinence.
Mais ici, Philippe Arnaud trouve un angle d'attaque assez intéressant et original. Les agents secrets de la cour de récré fonctionne vraiment bien et dénonce les harceleurs de tous bords ! En effet, inventer une agence recrutant des ados pour se battre contre le harcèlement, pas uniquement celui envers les élèves mais aussi envers les professeurs, c'est très malin ! Et assez inédit.
De plus, c'est une très bonne idée que les personnages mis en scène, acteurs sur ce problème, soient de l'âge (ou proche) du lectorat visé et qu'on les invite à régler les difficultés de façon intelligente et réfléchie. Car le harcèlement peut prendre bien des formes et pour en venir à bout, il faut ruser et s'adapter...
A travers cette histoire, l'auteur, d'une façon plus détournée, donne des pistes pour en parler mais aussi pour l'identifier.
Philippe Arnaud réussit à intégrer tout cela de manière très naturelle dans une intrigue bien menée où se jouent d'autres combats, à plus grande échelle. Car oui, si certains luttent, dans toutes les écoles du pays, contre les oppresseurs, d'autres sont là pour les raisons inverses : les régulateurs.
A la tête de l'organisation qui tente d'éliminer le harcèlement : Donald Jones qui doit sans cesse lutter contre Rector Jones, son frère, jumeau maléfique, qui cherche, lui, à maintenir ce mal qui ronge le système scolaire.
Les deux héros, ralliés au camp de Donald, seront aussi convoités par la partie adverse. En plus de cette nouvelle vie d'espions, de leur entraînement et de leurs missions quotidiennes, ils se retrouvent au coeur d'une lutte qui les dépasse complètement. Comme si être agent secret collégien n'était pas déjà assez compliqué !
Tout est là pour nous tenir en haleine.
Ce roman reprend les codes et différents éléments d'un bon roman d'espionnage : une base secrète avec ses portes dérobées et passages secrets, une formation spéciale avec un entraînement de choc, un scientifique fou mais génial et des gadgets pratiques mais insolites cachés dans des objets plutôt anodins (un sac à dos qui lance des boulettes de papier, un stylo enregistreur, des oreillettes spéciales permettant de communiquer entre agents...), des méchants très méchants prêts à tout, un majordome so british, des véhicules qui se transforment en un temps record (une moto et son side-car rétractable)...
On se croirait dans un James Bond. Seule différence : ici, tout se déroule sur les bancs de l'école. Mais cela n'empêche pas qu'il y ait de l'action et du danger.
Et aussi évidemment, du suspense et de l'humour... sans oublier bien sûr une histoire d'amour.... euh non, pardon, d'amitié (quoi que?).
Je ne vous ai pas vraiment parlé d'Alexandre (qui veut qu'on l'appelle Al) et de Julie. Tous deux sont assez différents mais ont des qualités indéniables (qui font qu'ils ont été recrutés) et leur histoire personnelle explique que l'injustice les révolte profondément. Ils sont très attachants, chacun à leur façon. Ils cachent leurs faiblesses sous des airs très assurés et parfois un peu insolents. Mais au fond, ils restent des enfants. Je les ai beaucoup aimés l'un et l'autre.
Pour finir, j'ai également bien accroché à l'univers graphique parfaitement adapté à celui de l'histoire.
C'est donc encore un très bon Pépix qui change un peu de ton. Il m'a paru un peu plus sérieux que certains mais j'y ai trouvé autant d'intérêt et matière à réfléchir.
J'ai découvert une autre facette de Philippe Arnaud. Et celle-ci, comme l'autre, me plaît beaucoup !
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