"- Je suis là, Mamie, dis-je d'une toute petite voix.
- Oui, c'est vrai. Tu es comme Teddy.
- Tu m'as déjà dit ça hier.
- Ah bon?
- Tu ne parles jamais de lui. Et là, tu as prononcé son nom deux jours de suite.
- Si tu le dis..., murmure Mamie. Je pense de plus en plus à lui. C'est étrange, non? Plus on vieillit, plus on pense au passé. Va savoir pourquoi...
- Parce que le passé augmente un peu plus chaque jour.
Mamie s'esclaffe.
- Toi, alors !"
#AllanStratton
Les chiens, roman du même auteur (Milan, 2015) avait été un coup de coeur. L'ambiance m'avait vraiment mis les nerfs en pelote... J'avais eu bien peur et, comme d'habitude avec les romans du genre, j'avais adoré ça. L'échappée (Milan, 2016), thriller psychologique abordant le thème de la manipulation, avait su me séduire tout en me glaçant le sang, d'une autre manière.
La maison des oiseaux me tentait depuis sa sortie mais l'occasion de le lire ne s'était pas encore présentée.
C'est un peu par hasard que ce titre est revenu sur le haut de ma PAL. Grâce à Enora du blog Les Dream-Dream d'une bouquineuse, dans le cadre d'une lecture commune, j'ai enfin découvert ce qui se tramait dans La maison des oiseaux. Je n'ai pas été déçue.
Horrifiée lors de certains passages, j'ai aussi été très émue.
#QuatrièmeDeCouv'
"Le seul refuge de Zoé, c'est la maison des Oiseaux, la demeure de sa grand-mère.
Mais Mamie perd un peu la tête, et les parents de Zoé décident de la placer dans une maison de retraite. Pour Zoé, c'est insupportable.
Alors elle entraîne la vieille dame dans un voyage à travers le pays, à la recherche d'un oncle qu'elle croyait disparu. Or les secrets de famille et la réalité crue vont s'inviter sur le chemin..."
#RéalitéCrue
Effectivement, ce qui frappe à la lecture de ce roman, c'est l'extrême réalisme de toutes les situations. Et c'est pour cela que j'ai été autant touchée par ce texte.
Le noeud de cette histoire c'est la relation qui lie Zoé à sa grand-mère, l'amour que l'une porte à l'autre et inversement. Zoé, qui voit sa grand-mère perdre la tête, devenir dépendante, vieillir, reste très présente, bienveillante, aidante. C'est très beau toute cette abnégation. Parce qu'avec Zoé, on assiste au meilleur, comme au pire. Les descriptions de moments de grande complicité, d'émotions et de souvenirs partagés contrastent avec celles des épisodes plus concrets de ce que peut aussi être la perte d'autonomie...
Tout cet aspect, jusqu'au dénouement, m'a vraiment prise aux tripes, trouvant écho dans mon propre vécu. Alan Stratton n'épargne aucun détail. Et c'est aussi le cas pour tous les autres sujets traités dans ce livre. Et mine de rien, ils sont nombreux, variés et originaux !
Zoé vit avec ses parents une relation compliquée. Sans cesse dévalorisée, comparée à sa cousine Madi -qu'elle surnomme "Lèche-cul"- la jeune fille est en colère. Elle a d'ailleurs toutes les raisons de l'être. Madi est une véritable peste avec elle et s'amuse à mettre Zoé dans des situations compromettantes. Les parents de Madi, Jess et Chad, ne cessent également de se moquer de la situation un peu précaire des parents de Zoé, mettant en avant la leur, plus aisée. C'est assez horrible aussi tout ce pan du roman où l'on voit l'héroïne complètement embourbée dans une situation tendue que personne ne semble vouloir voir. Zoé se noie et Madi continue de lui maintenir la tête sous l'eau. L'auteur met à jour une autre forme de harcèlement, dans la cellule familiale.
De fait, un événement terrible (dont Madi est responsable) va précipiter la fugue de Zoé avec sa grand-mère. Comme un ultime appel à l'aide, toutes deux vont partir, fuir à Toronto, à la recherche de Teddy.
Le prénom de cet oncle mystérieux revient sans cesse mais on ne sait rien à part qu'autour de lui plane un secret honteux. Avec Teddy, on met le doigt sur un autre sujet, très important et peu traité dans la littérature ado. Dois-je vous en dire plus? Je ne crois pas non si je ne veux pas révéler un élément clé et surprenant du récit.
Harcèlement, vieillesse, conflits familiaux, problématiques adolescentes... tout est traité sans filtre, durement, et c'est ça qui est bien justement.
Il y a quelques passages un peu plus farfelus, incroyables - lors de la virée de Zoé et Mamie à Toronto notamment- mais il faut bien aussi un peu de piment, un peu de fantaisie pour éclairer la noirceur de l'ensemble.
La maison des Oiseaux est dur, violent, sombre mais il est aussi empli de la lumière et du bonheur au coeur de la relation privilégiée entre la grand-mère et sa petite fille.
C'est un roman très touchant qui, par la diversité des sujets abordés, l'émotion débordante, la violence inhérente, le réalisme percutant, ne pourra pas vous laisser complètement indifférent.
#Épilogue
" La vie est un livres d'histoires. Nos histoires dépendent de ce qui se passe ou pas; de ce que nous savons ou pas; de ce que nous oublions, et pourquoi. C'est ce qui rend la vérité difficile à raconter. Parce que le passé ne reste jamais immobile : il change au fil du temps."
#PourQui?
Pour ceux et celles qui aiment les histoires de famille.
Pour ceux et celles qui aiment les romans réalistes à l'extrême.
Pour ceux et celles qui cherchent une histoire sur le harcèlement.
Pour ceux et celles qui aiment les histoires fortes sur des relations entre grands-parents et petits-enfants.
Pour tous et toutes à partir de 14 ans.
#VosCommentaires